Droit relatif aux violences sexuelles : les fondamentaux
Identification et qualification des VSS
Vous êtes victimes, témoins ou confidents d'agissements sexistes quand :
Vous êtes l'objet de remarques, réflexions, blagues, injonction sur les femmes ou parce que vous êtes une femme. Par exemple, attribuer votre mauvaise humeur au fait que vous auriez vos règles. UN SEUL AGISSEMENT suffit à caractériser que vous êtes victime de sexisme.
C'est interdit par le Code du travail (CT) / le Code général de la fonction publique (CGFP) : "Nul ne doit subir d'agissement sexiste, défini comme tout agissement lié au sexe d'une personne, ayant pour objet ou pour effet de porter atteinte à sa dignité ou de créer un environnement intimidant, hostile, dégradant, humiliant ou offensant" (Article L.1142-2-1 du CT / Article L131-3 du CGFP ).
Vous êtes victimes, témoins ou confident·es de harcèlement sexuel quand :
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Vous êtes l'objet de remarques, réflexions, blagues à connotation sexuelle ou sexiste à au moins deux reprises, tels que des commentaires sur votre physique, vos tenues vestimentaires, des confidences imposées sur la vie sexuelle, des questions sur votre vie sexuelle, une proximité physique intrusive, l'imposition d'images pornographiques.
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Vous êtes l'objet de ces propos ou comportements par plusieurs personnes (dans la majorité des cas, des hommes), successivement, qui peuvent chacun avoir commis un acte unique mais savent que pour vous, les propos ou comportements sont répétés.
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Vous êtes l'objet d'un chantage à caractère sexuel
C'est interdit par le Code du travail : "Aucun salarié ne doit subir des faits :
1° Soit de harcèlement sexuel, constitué par des propos ou comportements à connotation sexuelle ou sexiste répétés qui soit portent atteinte à sa dignité en raison de leur caractère dégradant ou humiliant, soit créent à son encontre une situation intimidante, hostile ou offensante ;
Le harcèlement sexuel est également constitué :
a) Lorsqu'un même salarié subit de tels propos ou comportements venant de plusieurs personnes, de manière concertée ou à l'instigation de l'une d'elles, alors même que chacune de ces personnes n'a pas agi de façon répétée ;
b) Lorsqu'un même salarié subit de tels propos ou comportements, successivement, venant de plusieurs personnes qui, même en l'absence de concertation, savent que ces propos ou comportements caractérisent une répétition ;
2° Soit assimilés au harcèlement sexuel, consistant en toute forme de pression grave, même non répétée, exercée dans le but réel ou apparent d'obtenir un acte de nature sexuelle, que celui-ci soit recherché au profit de l'auteur des faits ou au profit d'un tiers". (Article L.1153-1).
ATTENTION le Code général de la fonction publique (article L133-1) ne reprend pas exactement les mêmes définitions. Il reprend le 1° du Code du travail mais sans les propos et comportement sexistes (seuls les propos et comportements à connotation sexuelle sont qualifiables de harcèlement sexuel) et le 2° (la pression grave pour obtenir un acte sexuel).
Vous êtes victimes, témoins ou confident·es d'exhibition sexuelle quand :
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Une personne vous impose la vue d'une partie dénudée et intime de son corps
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Un homme se masturbe devant/a côté de vous, sous ses vêtements ou le simule
C'est interdit par le Code pénal et assimilé au harcèlement sexuel en droit du travail : "L'exhibition sexuelle imposée à la vue d'autrui dans un lieu accessible aux regards du public est punie d'un an d'emprisonnement et de 15 000 euros d'amende.
Même en l'absence d'exposition d'une partie dénudée du corps, l'exhibition sexuelle est constituée si est imposée à la vue d'autrui, dans un lieu accessible aux regards du public, la commission explicite d'un acte sexuel, réel ou simulé." (Article 222-32 du Code pénal).
Vous êtes victimes, témoins ou confident·es d'agressions sexuelles quand :
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Une personne, un homme le plus souvent, touche sans votre accord vos fesses, votre poitrine, vos cuisses, votre sexe ou vous embrasse sur la bouche
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Une personne, un homme le plus souvent, touche n'importe quelle partie de votre corps dans un contexte à connotation sexuelle ou avec son sexe
C'est interdit par le Code pénal et assimilé au harcèlement sexuel en droit du travail : "Constitue une agression sexuelle toute atteinte sexuelle commise avec violence, contrainte, menace ou surprise." (Article 222-22 du Code pénal).
Vous êtes victimes ou confident·es de viols quand :
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Une personne, presque toujours un homme, pénètre sans votre accord, votre vagin, votre anus ou votre bouche, avec son pénis ou tout objet connotant un pénis
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Une personne, presque toujours un homme, vous impose un cunnilingus ou vous fait une fellation sans votre accord
C'est interdit par le Code pénal et assimilé au harcèlement sexuel en droit du travail : "Tout acte de pénétration sexuelle, de quelque nature qu'il soit, ou tout acte bucco-génital commis sur la personne d’autrui ou sur la personne de l’auteur par violence, contrainte, menace ou surprise est un viol." (Article 222-23 du Code pénal).
L'employeur a des obligations
Les employeurs privés, comme publics, ont plusieurs obligations en matière de harcèlement sexuel au travail :
- Assurer la santé et la sécurité des travailleuses et travailleurs (Article L. 4121-1 du code du travail)
- Assurer la prévention du harcèlement sexuel (Article L.4121-2 et L.1153-5 du Code du travail) notamment en sensibilisant ses équipes et en formant son encadrement mais aussi en intégrant le risque dans le Document Unique d’Évaluation des Risques Professionnels
- Mettre un terme aux agissements de harcèlement sexuel et protéger la victime, une fois informés (Article L.1153-5 du Code du travail)
- Sanctionner les agissements de harcèlement sexuel (Articles L.1153-5 et 1153-6 du Code du travail) et pour cela il doit réaliser une enquête immédiate, sérieuse et impartiale (Jurisprudence de la Cour de cassation)
- Ne pas discriminer/sanctionner une personne victime ou témoin de harcèlement sexuel (Article L.1153-2 et 1153-3 du Code du travail/ Article L.133-3 du CGFP)
- Pour les agent.es publics, vous octroyez la protection fonctionnelle afin de prendre en charge vos frais de justice et vous indemnisez de vos préjudices en lieu et place du mis en cause (Article L.134-1 à L.134-5 du CGFP).
Vous êtes victime : les démarches possibles
- Vous n'êtes pas encore prête à révéler ce que vous subissez à votre employeur :
C'est important que vous alliez à votre rythme. Afin de commencer à récolter des éléments de preuve sur les agissements du ou des harceleurs sexuels, vous pouvez :
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Tenir un carnet de bord, répertoriant et datant les propos et comportements à connotation sexuelle dont vous êtes l'objet
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Enregistrer le harceleur à son insu afin de récolter une preuve matérielle de son comportement (si, si, c'est possible!)
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Consulter la section syndicale de votre choix pour réfléchir ensemble à une stratégie de révélation des violences quand vous serez prête
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Consulter votre médecin traitant pour envisager un arrêt de travail permettant de souffler et dans tous les cas, pour qu'il inscrive dans votre dossier médical les symptômes que vous développez en lien avec les violences dont vous êtes victimes.
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Consulter la médecine du travail afin qu'elle vous vienne en aide, propose un aménagement de poste ou fasse une alerte sans vous nommer à l'employeur
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Déposer une main courante au commissariat le plus proche et en conserver une copie (attention, en gendarmerie votre main courante peut donner lieu à l'ouverture d'une enquête)
- Vous êtes prête à révéler ce que vous subissez à votre employeur pour qu'il agisse et (nous l'espérons) protège votre santé et votre sécurité:
Il est très important d'avoir des traces écrites des échanges avec l'employeur ou l'encadrement intermédiaire.
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La première démarche est donc d'envoyer un récit précis, le plus détaillé et circonstancié possible à votre direction, en demandant à ce qu'elle mette en œuvre ses obligations
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Si vous avez confiance dans les élu.es au Conseil social et économique (CSE) ou CHSCT pour la fonction publique, mettez le CSE en copie de votre courrier afin qu'il puisse agir au sein de cette instance
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Si vous n'êtes pas en capacité de travailler, allez voir votre médecin afin qu'il vous mette en arrêt de travail. En fonction des circonstances, vous êtes sûrement fondée à être placée en accident du travail ou en maladie professionnelle
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Vous pouvez par ailleurs saisir l'inspection du travail afin que les services réalisent une enquête indépendante sur les agissements dont vous avez été victime.
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Faites-vous aiguiller par une association. La seule en France qui est spécialisée pour vous orienter à faire valoir vos droits en cas de violences sexistes et sexuelles commises dans les relations de travail est l'AVFT, joignable au 01 45 84 24 24 à certains horaires d'ouverture.
LE DÉPÔT DE PLAINTE CONTRE LE HARCELEUR EST UN DROIT,
JAMAIS UNE OBLIGATION POUR QUE VOTRE EMPLOYEUR AGISSE